November 25 is the International Day for the Elimination of Violence against Women, and to mark the day this blog has been written by Carolien Jacobs (Leiden University) Patrick Milabyo Kyamugusulwa (ISDR-Bukavu), and Rachel Sifa Katembera, all three members of the Humanitarian Observatory DRC. The authors argue throughout that it is important that we realise that sexual and gender-based violence (SGBV) consists of more than only sexual violence, it also includes structural violence that regulates justice. This is also the case in conflict-settings such as the east of the DRC, where a lot of attention goes to sexual violence.
Le 25 novembre est la Journée Internationale pour l’Élimination de la Violence à l’égard des Femmes. Pour marquer cette journée, ce blog a été rédigé par Carolien Jacobs (Université de Leiden), Patrick Milabyo Kyamugusulwa (ISDR-Bukavu), et Rachel Sifa Katembera, tous membres de l’Observatoire humanitaire de la République Démocratique du Congo (RDC). Les auteurs soutiennent qu’il est important de comprendre que les violences sexuelles et basées sur le genre (VSBG) ne se limitent pas seulement à la violence sexuelle, mais inclut également la violence structurelle qui régit la justice. C’est également le cas dans les situations de conflit comme à l’est de la RDC, où une grande attention est portée à la violence sexuelle.
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À une époque où le slogan « son corps, mon choix » gagne rapidement – et malheureusement – du terrain sur les réseaux sociaux, il est important que nous soyons conscients de l’éventail des crimes que constituent les violences sexuelles et basées sur le genre (VSBG) : il s’agit de bien plus que de simples violences sexuelles physiques.
Depuis de nombreuses années, les violences sexuelles dans l’est de la République démocratique du Congo suscitent l’attention des médias, des donateurs internationaux et des académiques, en particulier lorsqu’elles sont commises par des groupes armés. En 2018, le Dr Denis Mukwege, gynécologue de renom, a reçu le prix Nobel de la paix pour ses « efforts visant à mettre fin à l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre et de conflit armé ». Bien que nous ne souhaitions en aucun cas nier ou minimiser la forte prévalence des violences sexuelles en RDC – comme l’a également montré Bilge Sahin, collègue de l’ISS –, nous aimerions utiliser ce blog pour attirer l’attention sur d’autres formes de violence structurelle dans de nombreux pays de notre monde patriarcal dominant. Ces formes de violence fondée sur le genre sont profondément ancrées dans les structures de la société, ce qui rend difficile pour les femmes (et les minorités) de revendiquer leurs droits et d’obtenir justice. Dans un précédent blog de cette série, Patrick Milabyo et Delu Lusambya ont déjà souligné l’importance de repenser les normes de la masculinité et de lutter contre la masculinité toxique.
Dans ce blog, nous attirons l’attention sur deux formes de violence répandues qui touchent de manière disproportionnée les femmes dans l’est de la RDC, à savoir la violence liée aux conflits d’héritage et aux accusations de sorcellerie. Qu’est-ce qui est problématique dans ce cas ? À quels défis les femmes sont-elles confrontées lorsqu’elles cherchent à obtenir justice (étatique ou non) dans de telles situations ? Et que peut-on faire à ce sujet ?
Droit de succession : décalage entre droit étatique et droit coutumier
Selon le Code de la famille congolais, révisé en 2016, les femmes ont droit à une part similaire des biens de leurs parents après leur décès. Pourtant, dans la plupart des régions du pays, la coutume veut que seuls les héritiers masculins aient le droit d’hériter, alors que les filles restent souvent bredouilles, Ceci s’applique également aux enfants nés hors mariage, s’ils ont été reconnus par le défunt de son vivant. Ainsi, tous les enfants constituent la première catégorie d’héritiers (art. 758.1). Un problème similaire se pose pour le droit de succession des époux, qui est encore plus compliqué dans les mariages polygames et dans les mariages conclus uniquement sur une base religieuse ou coutumière. Cela signifie qu’en cas de décès du mari, sa famille réclame souvent les biens, la femme perdant tout, même si le partenaire survivant, les parents et les frères et sœurs du défunt sont tous des héritiers de deuxième catégorie selon le Code de la famille de la RDC (art. 758.2). S’il n’y a pas d’enregistrement officiel du mariage, les femmes dépendent des autorités coutumières pour appliquer le Code de la famille statutaire, mais ces autorités (plus souvent en milieu rural) adhèrent souvent plus fermement aux normes coutumières qui prescrivent la restitution des biens du couple à ses beaux-parents. Dans la pratique, nous constatons des efforts de la société civile pour sensibiliser les gens au Code de la famille et au droit des femmes à hériter à la fois en tant qu’épouses et en tant que filles. Pourtant, il reste courant que les familles divisent les biens uniquement entre les hommes, les filles et les épouses étant souvent perdantes.
Accusations de sorcellerie
Partout en Afrique, les États ont du mal à trouver des moyens de faire face à la sorcellerie et aux accusations de sorcellerie. Ce n’est pas différent en RDC, où l’État ne reconnaît pas l’existence de la sorcellerie, ni les menaces de sorcellerie (Dunn 2024). Les accusations de sorcellerie sont le plus souvent dirigées contre les femmes, en particulier les femmes âgées. Les accusations de sorcellerie sont des indicateurs de tensions et de méfiance dans les relations sociales. Même si de telles accusations manquent de preuves matérielles, elles sont difficiles à contre-attaquer pour la personne accusée. Les autorités locales (étatiques et non étatiques) n’ont souvent pas le pouvoir de traiter de telles accusations et d’apaiser les tensions, et les victimes de (fausses) accusations ne peuvent pas recourir à un cadre juridique pour faire face à ces accusations. Par mesure de protection, nous constatons que les femmes accusées sont parfois expulsées de leurs communautés, voire placées en détention pour les protéger de la « justice populaire ». Les « recours » proposés par la police et d’autres services de l’État portent donc encore plus atteinte à leurs droits et risquent de transformer les femmes accusées en doubles victimes.
En quête de justice pour la violence basée sur le genre sous toutes ses formes
Les femmes de l’est de la RDC sont touchées de manière disproportionnée par les injustices liées aux litiges successoraux et aux accusations de sorcellerie. Pour le premier type d’injustices, un cadre juridique approprié existe, mais son application est en contradiction avec la pratique quotidienne dans de nombreux endroits, plus particulièrement en milieu rural, même lorsque la connaissance juridique des droits des femmes en matière d’héritage existe. Les accusations de sorcellerie sont plus difficiles à traiter dans les cadres juridiques et rationnels de la justice étatique, mais les solutions actuelles recherchées par les autorités font encore plus de mal.
En résumé, nous soutenons que même si les institutions judiciaires étatiques sont accessibles, des facteurs sociétaux peuvent encore entraver la reconnaissance des droits des femmes et perpétuer la violence basée sur le genre. La sensibilisation juridique et la promotion d’un changement de culture sont toutes deux nécessaires pour surmonter les conflits entre les droits humains et les pratiques culturelles qui désavantagent les femmes. Bien que nous nous concentrions ici sur la RDC, des exemples de violence basée sur le genre peuvent être trouvés dans le monde entier. Ne restons pas silencieux à ce sujet et reconnaissons que la VSBG ne se limite pas seulement aux VS !
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Auteurs :
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Carolien Jacobs est professeure assistante à l’Université de Leiden et mène des recherches en collaboration avec le Centre des sciences sociales pour le développement Africain-KUTAFITI.
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Patrick Milabyo Kyamusugulwa est professeur à l’Institut supérieur des techniques médicales de Bukavu, en République démocratique du Congo (RDC). Il est membre de l’Observatoire humanitaire de la RDC et membre du Centre des sciences sociales pour le développement Africain-KUTAFITI.
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Rachel Sifa Katembera est chercheuse au Centre des sciences sociales pour le développement Africain-KUTAFITI et membre de l’Observatoire humanitaire de la RDC.
Ce blog est basé sur des recherches empiriques menées par les auteurs sur l’accès à la justice dans l’est de la RDC dans le cadre de l’Alliance Just Future.
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